Παρέμβαση του Αρχιεπισκόπου Βερολίνου
και Γερμανίας (Ρωσική Ορθόδοξη Εκκλησία) στο συμπόσιο που οργάνωσε το
Πανεπιστήμιο Μόσχας, Άγιος Τύχων σχετικά με την Πανορθόδοξη Σύνοδο
Intervention de l’archevêque de Berlin et d’Allemagne (Église
orthodoxe russe hors-frontières) au colloque organisé à l’Université
Saint-Tikhon de Moscou au sujet du Concile panorthodoxe
À l’occasion du colloque organisé le 19 avril à l’Université
Saint-Tikhon de Moscou au sujet du Concile panorthodoxe, l’archevêque de
Berlin et d’Allemagne Marc a commenté le message de l’Église orthodoxe russe
hors-frontières au sujet des projets de documents préconciliaires destinés à
être soumis au futur Concile panorthodoxe :
Éminence,
Excellences, révérends Pères, Frères et Sœurs,
Comme
nous l’avons entendu dans la conférence de S.E. le métropolite Hilarion [de
Volokolamsk, ndt], les documents qui ont été publiés sont passés par des
périodes d’élaboration, de discussions, de finalisation ayant duré de nombreuses
années, parfois même de nombreuses décennies, et cela se ressent très fortement
dans certains documents, tandis que dans d’autres, cela est atténué,
probablement parce que les thèmes étaient plus simples. Mais il reste que, à
mon avis, ainsi qu’à celui de beaucoup de nos archipasteurs et pasteurs, deux
de ces documents causent une certaine préoccupation. Celle-ci est liée à
l’absence de clarté que l’on y rencontre, une absence de clarté avant tout
terminologique, qui peut donner lieu à des interprétations erronées. Cela
concerne les documents « Relations de l’Église orthodoxe avec le reste du
monde chrétien » et « La mission de l’Église orthodoxe dans le monde
contemporain ». Il y a certaines craintes également en ce qui concerne le
règlement du Concile, mais S.E. le métropolite Hilarion a déjà répondu en
partie à celles-ci. Avant tout, je vais aborder le document appelé
« Relations de l’Église orthodoxe avec le reste du monde chrétien ».
Chez nous, ce document appelle une grande vigilance au regard de
l’ecclésiologie orthodoxe. La terminologie est confuse dans ce document, elle
n’est pas claire et peut donner lieu à toutes les interprétations erronées.
Bien qu’au début de ce document figure une phrase très claire, et encourageante
pour moi personnellement ainsi que pour beaucoup d’évêques, selon laquelle
l’Église orthodoxe est définie comme l’Église Une, Sainte, Catholique et
Apostolique, qui établit son unité, comme cela y est dit, sur le fait qu’elle
est fondée par notre Seigneur Jésus-Christ, ainsi que sur la communion dans la
Sainte Trinité et dans les sacrements. Cependant, malheureusement, une telle
terminologie claire, non ambiguë, est loin d’être maintenue dans le reste du
document, où il est dit, je cite : « L’Église orthodoxe reconnaît
l’existence historique d’autres églises et confessions chrétiennes ne se
trouvant pas en communion avec elle ». Cela, sous une forme différente,
sous un aspect différent, fait que l’on rappelle maintes fois la question des
autres « Églises ». Pour nous, une telle terminologie est
inacceptable. Peut-être dois-je dire que je sens souvent, qu’en Russie, nos
archipasteurs et pasteurs ont une attitude plus favorable envers les autres
« Églises », les autres confessions, que nous à l’étranger, parce que
nous sommes confrontés à celles-ci tous les jours, nous savons de quoi il
s’agit et que, en partie, nous sommes issus de ces communautés. C’est pourquoi,
nous avons, peut-être, une perception plus aiguë de ce thème mais je sais,
néanmoins, que cela inquiète de nombreuses personnes, et ce non pas seulement
dans notre Église. En fait, ceux qui ont protesté les premiers contre cette
formulation étaient des Grecs. Et cela me réjouit parce que les Grecs
constantinopolitains, de toute évidence, considèrent souvent que nous, Église
russe, avons toujours été opposés à ce qu’ils proposaient. Dans le cas présent,
ce sont les Grecs eux-mêmes des Églises de Grèce et de Chypre qui ont apporté
une contribution très intéressante à cette discussion. Lorsqu’il est dit que
l’Église est fondée par notre Seigneur Jésus-Christ, on oublie de toute
évidence qu’elle constitue également Son Corps mystique, ce que nous ne
saurions omettre. Si un tel fondement du Corps du Christ est clair pour nous,
alors il ne peut être question d’une multitude d’Églises. Cela, nous ne pouvons
en parler que dans une discussion privée, personnelle, mais non au niveau d’une
conférence panorthodoxe. L’unité de l’Église, à notre avis, ne saurait être
mise en question. Il n’est dit nulle part dans le texte que la division qui
existe à notre époque s’est produite suite à des schismes et des hérésies.
Certes, dans la vie de tous les jours, nous pouvons ne pas aller à la rencontre
de chaque protestant en lui disant « tu es un hérétique ». Mais
lorsque l’on me demande : « Me considérez-vous comme un
hérétique ? », je dois le dire. Je dois comprendre que, à la base de
ces prétendues « Églises » existant maintenant, se trouve l’hérésie
ou le schisme. Mais, dans ce document, on parle constamment d’une mystérieuse
unité chrétienne. Il n’est dit nulle part ce dont il s’agit. Est-ce un
quelconque méli mélo ? Si nous parlons de la prépondérance de l’Église
orthodoxe, de l’unité des fidèles en Christ, de l’Église une sainte, catholique
et apostolique etc., alors nous ne pouvons en même temps, dans le même
document, parler de la multitude des Églises. Parler de l’unité chrétienne
perdue et du rétablissement de celle-ci, est magnifique, Dieu merci, on en
parle. Mais le rétablissement de l’unité ne peut se produire par des voies
nébuleuses. Là, rien n’est dit au sujet de tous ceux qui ont quitté cette unité
avec l’Église orthodoxe, que nous invitons à revenir, il n’est pas dit que nous
sommes des témoins, sans orgueil aucun de notre côté (ce n’est pas à nous que
revient le mérite d’être orthodoxes, mais le Seigneur nous a appelés dans
l’Église Une) et pour cette raison, nous devons témoigner de cette vérité, et
ne pas la voiler, comme on le fait ici. Il ressort de ce texte que l’Église
orthodoxe est une quelconque petite partie d’un tout, c’est une sorte de
fragment, comme tous les autres. Et il n’est pas dit que la perte de l’unité
des hétérodoxes, c’est précisément la perte de leur unité avec l’Église
orthodoxe. Encore une fois, dans une conversation privée, nous pouvons
permettre de telles choses, mais non dans un document panorthodoxe, à mon avis,
cela est inacceptable. Il y a encore une chose dangereuse, c’est la déclaration
de ce document au sujet de la pratique du prosélytisme. Selon une phrase du
document, toute pratique de prosélytisme est exclue ainsi que d’autres actions
provoquant des manifestations d’antagonisme interconfessionnel. Il ne faut pas
confondre ces deux choses, excusez-moi. On ne peut les laisser à égalité dans
une phrase. Une chose est le prosélytisme auquel le Seigneur nous a tous
appelés et envoyés, et autre chose est effectivement la manifestation malsaine
d’antagonisme interconfessionnel, ce que nous voulons tous éviter. Ici, nous
devons distinguer nettement ces deux choses. Parce que si nous les confondons,
on arrive à nouveau à une quelconque égalité entre les confessions, nous sommes
alors tous égaux et nous devons tous revenir quelque part, on ne sait pas où…
Un
autre document qui appelle, peut-être, une vigilance encore plus grande, c’est
le document sur la mission de l’Église orthodoxe dans le monde contemporain.
Là, à mon avis, il y a des erreurs portant sur l’anthropologie. Le passage clé
dans ce document est celui où il est question de la personne humaine. Or, comme
nous l’avons déjà indiqué, il faut parler ici de l’homme ! « La
personne humaine » est une nouvelle expression, non patristique et non
liturgique. Ceci étant, ce problème est identique dans toutes les variantes
linguistiques de ce texte. Ceci est le plus flagrant dans le texte grec.
J’ignore quel texte se trouvait à l’origine de ce document, mais le texte grec
est absolument absurde, comme l’ont montré les évêques grecs, parce que l’on y
utilise le mot « prosopon », qui est en général utilisé seulement
pour les Personnes de la Sainte Trinité, et les Grecs eux-mêmes l’ont relevé.
Il y a, dans la traduction russe, la meilleure variante, étant donné qu’à de
nombreux endroits, on utilise malgré tout le mot « homme », et non
« la personnalité humaine ». Et dans les textes français, grec et
anglais, il y a cette terminologie inacceptable. Il faudrait, dans le texte
russe, procéder de façon conséquente, et utiliser dans tout le texte le mot
« homme », au lieu de « personnalité humaine », qui crée
ici une confusion entre ce qui est incréé – la Sainte Trinité – et le créé dans
l’homme.
Ce
sont donc les éléments qui, à notre avis, demandent des corrections et des
définitions précises. Beaucoup de choses importantes sont dites dans ces
textes, particulièrement dans ce texte où il est question de la place de l’Église
dans le monde contemporain. Il ne faudrait pas, naturellement, tout supprimer
mais, à mon avis, il faut préciser et éviter, voire enlever toutes ces
contradictions inutiles, qui sont présentes dans ce texte.
Encore
un élément important : pour quelles raisons y parle-t-on de
« genres », alors que l’on a simplement en vue le sexe. Pourquoi
faut-il introduire un quelconque « genre » ? Cela est
incompréhensible.
Pour
ce qui concerne la procédure du Concile, il y a un passage troublant, c’est la
référence au fait que l’esprit conciliaire ou l’institution conciliaire dans
l’Église a toujours préservé la vérité de la foi. C’est simplement faux. Les
Conciles ont simplement transmis ce qu’ils ont hérité du Seigneur, ils révèlent
la volonté divine, mais ils ne l’établissent pas eux-mêmes. Le métropolite
Hilarion a déjà parlé au sujet de la décision conciliaire, je lui suis
reconnaissant pour cette clarification. Bien sûr, tenant compte de tout cela,
ce serait mieux, en fonction de toutes ces lacunes, et cela faciliterait
beaucoup les choses, si nous utilisions non pas le mot « Concile »,
mais « Conférence panorthodoxe ». Cela ferait disparaître toute la
tension qui existe dans le peuple et qui, peut-être, est fondée, mais il y a
ici un malentendu, parce que nous partons ici de la langue grecque où en fait
il n’y a pas de différence fondamentale entre les mots « Concile »,
« Réunion » et conférence ou consultation. Si nous utilisions le mot
« conférence » nous ferions disparaître cette grande tension.
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